HÉGÉMONIE DE GOOGLE ? COMMENT EN EST-ON ARRIVÉ LÀ..LES SUITES ET RISQUES ÉVENTUELS ?
Pour ce sixième interview du grand expert Internet DAVID FAYON,nous avons voulu lui poser cette question qui interpelle tous les internautes et le monde des medias..Car,comment,dans une société libérale,peut-on comprendre l'hégémonie de GOOGLE ? Et quels en sont les risques..Jusqu'où ce phénomène peut-il continuer ?
VOICI LA RÉPONSE DE L'EXPERT DAVID FAYON :
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. Comment en est-on arrivé à cette massification hégémonique du géant Google ? Pourquoi a-t-on un monopole dans le système libéral ?
Avec la première génération du Web initiée en 1994-1995, les moteurs de recherche étaient Alta Vista et l’annuaire Yahoo ! Puis la bulle Internet de mars 2000 a permis à un acteur montant, Google, lancé en 1998 de débaucher des talents à moindre coût, de poursuivre discrètement son ascension. Le moteur de recherche Google repose sur une
simplicité de son interface et une pertinence des résultats délivrés lors des requêtes, le tout allié à une rapidité de l’outil basé sur un algorithme pertinent et performant. Son algorithme relativement secret a un principe majeur, le nombre de liens pointant vers une page et le poids de chacun de ses liens tout en mesurant la pertinence des liens qui permet de mesurer l’importance de la page. À côté de la fonction de recherche, un solide modèle économique a été construit (le programme AdWords/AdSense lequel génère 98 % des revenus de Google) qui permet à ceux qui souhaitent voir figurer leur site/blog dans les premières positions des requêtes faites par les internautes sur Google d’acheter des mots clés via un système d’enchères. Ces mots clés se retrouvent dans les liens sponsorisés qui sont utiles et perçus comme non intrusifs pour l’internaute.
Outre le moteur de recherche, une communauté de services ont été développés autour et d’autres résultent de la croissance externe de Google (YouTube par exemple). Le cash généré par Google permet de financer la recherche et le développement et l’acquisition de start-up innovantes. Le niveau de marge à deux chiffres de l’entreprise est hors du commun.
Nous avons cependant des concurrents. Le moteur de recherche Bing de Microsoft par exemple et l’annuaire Yahoo qui propose une communauté de services. Internet ne se limite pas à Google. Mais pour ce qui est des moteurs de recherche, force est de constater que Google règne en maître avec néanmoins des exceptions selon les pays où les parts de marché de Google diffèrent. En France Google représente 90 % des recherches effectuées.
En revanche, dans les réseaux sociaux, le combat est tout autre et Google est peu implanté (Orkut par exemple) même si avec le consortium OpenSocial, Google a posé des pions. La concurrence existe et l’on ne peut affirmer que nous avons un monopole même si Google essaye d’être monopolistique. Si je prends par exemple les navigateurs, alors qu’Explorer de Microsoft régnait en maître, Firefox, apparu voici 5 ans, occupe aujourd’hui près du tiers du marché et d’autres navigateurs intéressants sont apparus parmi lesquels Safari, Opera et Chrome.
2. Jusqu'où ça peu fonctionner ? Tout système subit la loi de l'univers et celle des atomes. Il est dual. Google est-il faillible ?
Google est l’un des géants du Web 2.0. Le virage du Web 3.0 qui sera la conjonction d’un Internet sémantique et de l’Internet des objets sera à négocier. Google s’y prépare avec des nouveaux outils (Google Square par exemple) car des acteurs comme Wolfram Alpha sont apparus. Tout dépend de la force de ses dirigeants charismatiques, et comme toute organisation qui prend de l’ampleur, de leurs successions dans plusieurs années. D’ici là, Google a une route bien tracée si des erreurs stratégiques ne sont pas commises quant aux choix technologiques, commerciaux et des usages et si des nouveaux entrants ne viennent pas le menacer. Pour cela, les géants du Web (Google, Microsoft, Yahoo, eBay et Amazon) surveillent de près les acteurs qui se profilent notamment dans le domaine des réseaux sociaux : Facebook, Twitter, FriendFeed (qui a été absorbé par Facebook) et l’eldorado que présente le marché des téléphones mobiles pour les applications Internet. Je crois qu’il ne faut pas perdre de vue que l’on disait Microsoft infaillible dans les années 1990 alors même que le logiciel libre est venu redistribuer les cartes et que Bill Gates a mal négocié l’entrée de Microsoft dans le monde d’Internet depuis la bureautique. Autre exemple, Apple a connu une période très difficile en l’absence de Steve Jobs, son génial créateur qui est revenu ensuite à la maison. Pour l’heure, je ne vois pas Google faillible pour les 5 ans à venir. Tout au plus, il peut perdre de sa superbe comme ce fut le cas d’IBM puis de Microsoft lors des transitions des périodes informatiques. Je vous invite à consulter à ce sujet les 3 périodes informatiques que j’ai synthétisées (http://livres-internet-web.over-blog.com/article-22518417.html) ainsi que mes livres.
3. Tout système hégémonique est pervers par essence. Google menace-t-il notre liberté d’internaute ?
Google laisse planer des craintes d’ordre « Big brother ». Le stockage des données nous concernant va très loin. Et nous n’avons pas d’application stricte du fameux « droit à l’oubli ». J’ai noté que notre ministre, Nathalie Kosciusko-Morizet venait de se prononcer à ce sujet, c’est une bonne chose. Les informations sorties de leur contexte et résumées peuvent dénaturer un message initial.
Google fait peur comme la peur que suscitait Microsoft au milieu des années 1990. Mais dans le monde des réseaux sociaux, c’est Facebook – qui au troisième trimestre 2009 a atteint pour la première fois de sa jeune histoire une rentabilité – qui fait davantage peur car collectant une immense base de données sur les personnes et avec des informations nominatives dites sensibles au sens de la CNIL comme la religion. Je ne pourrai conseiller à chaque internaute que de prêter une information toute particulière à son identité numérique, ses écrits sur le Web, etc. et de lire les chartes d’utilisation des réseaux sociaux. Cependant, des contre-pouvoirs existent avec la prise de conscience collective qui existe via les outils du Web 2.0, les pétitions en ligne, etc. Ainsi Facebook avait dû faire machine arrière vis-à-vis de son module Beacon. Néanmoins, plus que jamais, il convient d’être vigilant sur le réseau des réseaux.
David Fayon est auteur de « Clés pour Internet » et « Web 2.0 et au-delà », Economica
SITE : http://david.fayon.free.fr
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MERCI CHER DAVID FAYON POUR CETTE REMARQUABLE INTERVENTION !
VIE ETERNELLE.JEAN PAUZIN " PATRIARCHE DU WEB" 84 ANS.
Président du Club International Seniors Internet (omniblog)
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